Pionnière dans le domaine des maladies rares
Ecouter Elisabeth Minder parler de son travail, c’est ressentir son immense engagement qui lui valut une carrière très impressionnante.
En 1993, elle a été la première femme à être nommée médecin-cheffe au Triemli. Elle a dirigé l’Institut du laboratoire médical qui employait 50 personnes et réalisait un chiffre d’affaires de 12 millions de francs suisses. Après une formation en pharmacologie clinique, elle est entrée en contact pour la première fois avec les porphyries - un groupe de maladies rares presque toutes héréditaires - à l'Hôpital universitaire de Zurich. La forme la plus connue de cette maladie est caractérisée par une sensation de brûlure insupportable sur la peau causée par le soleil. En Suisse, seuls 80 patients environ souffrent de la protoporphyrie érythropoïétique (PPE).
De plus en plus de demandes et de traitements
Au Triemli, Elisabeth Minder a mis sur pied la seule consultation qui existe en Suisse à ce jour pour les patients atteints de porphyrie. « C’était la condition sine qua non de mon engagement. Je voulais réunir la recherche et la prise en charge des patients » se rappelle l’ancienne médecin-cheffe. Son patron d’alors a accepté. Depuis les débuts de cette consultation, dans les années 1990, le nombre de patients n’a cessé d’augmenter. Aujourd’hui, une dizaine de patients, y compris des étrangers font appel à cette consultation chaque semaine. Sans compter les nombreuses demandes qui émanent de professionnels ou de patients qui cherchent conseil auprès des spécialistes de la porphyrie.
Amélioration du diagnostic et de la thérapie
Dans les années 1990, on comptait environ 50% d’erreurs de diagnostic chez les patients atteints de porphyrie. Elisabeth Minder et son équipe ont développé de nouvelles méthodes d’analyse pour faciliter le diagnostic, La bâloise s’est également impliquée dans le développement du Scenesse, premier médicament efficace pour le traitement de la PPE. Elisabeth Minder tient à préciser qu’elle n’a pas touché un franc grâce au Scenesse. Sa récompense était ailleurs : elle se souvient « nous avons été les premiers à prescrire le Scenesse. Un patient m’a écrit pour me dire que lui et sa famille avaient déambulé pendant trois heures sous le soleil à Paris alors que, normalement il aurait dû se mettre à l’abri dans sa chambre d’hôtel. Quand le premier médecin conseil m’a dit que sa compagnie d’assurances allait prendre en charge le traitement, j’ai effectué une danse de joie. C’était une étape tellement importante ».
Conseil de décision pour une plus grande égalité de traitement
« Si l’on se réfère au passé, on peut affirmer que la sensibilisation aux maladies rares s’est améliorée », affirme Elisabeth Minder. « Le diagnostic et les thérapies ont également connu un développement considérable. Cependant, les médecins jouissaient d’une plus grande liberté thérapeutique auparavant ». Aujourd’hui le contrôle pratiqué par les compagnies d’assurances est exagéré. Pour chaque cas, il faut soumettre une nouvelle demande et le risque est que l’évaluation peut être différente, même au sein de la même assurance... Pour les personnes concernées, c’est épuisant. Ils sont toujours dans l’incertitude de savoir si leurs médicaments seront pris en charge pour l’année prochaine. Il me semble que l’on pourrait trouver un protocole de décision plus raisonnable, par exemple en instituant un comité de décision indépendant qui déciderait de la thérapie pour une maladie particulière » dit Elisabeth Minder.
Montrer plus de générosité
A l’avenir, Elisabeth Minder souhaite que l’accès au diagnostic et à la thérapie soient plus faciles. Elle voudrait aussi que les traitements existants soient disponibles et non plus bloqués des années durant faute d’accord sur le prix entre l’Office fédéral de la santé publique et la compagnie pharmaceutique. Elle fait aussi appel à plus de générosité lorsque les maladies sont si rares qu’il est impossible de mener des études thérapeutiques mais qu’il existe néanmoins une approche thérapeutique possible basée sur des critères scientifiques. « Si l’on compare le coût du traitement des maladies rares non oncologiques au coût total des soins de santé, le montant dévolu aux maladies rares n’est pas significatif. Et pourtant, pour un patient concerné, l’accès au traitement peut signifier une meilleure qualité de vie en lieu et place d’une vie marquée par les souffrances chroniques et évolutives qui conduisent souvent au décès » explique la zurichoise d’adoption. La pérennisation de la consultation dédiée à la porphyrie au Triemli n’est pas un sujet d’inquiétude pour Elisabeth Minder, sa nièce, médecin-cheffe en endocrinologie lui a succédé. Elisabeth Minder est rayonnante « pour moi c’est un coup de chance ».